UNE FLECHE LUMINEUSE POUR NOTRE-DAME

« Qu'il ferme sa gueule ! »... c'est ainsi que le général Georgelin a répondu à Philippe Villeneuve, l'Architecte en Chef des Monuments Historiques en charge de la cathédrale Notre-Dame de Paris, à propos de la reconstruction de la flèche de l'édifice incendié le 15 avril 2019. La scène s'est produite le 13 novembre 2019 lors d'une audition à l'Assemblée Nationale. Ces mots aigre-doux du militaire chargé par Emmanuel Macron de superviser la reconstruction de Notre-Dame reflètent la vivacité du débat opposant les partisans d'une reconstruction à l'identique (dont Philippe Villeneuve) et ceux qui plaident pour une « reconstruction inventive ». Les relations entre les deux hommes sont désormais détendues mais la question reste entière...

En ce qui me concerne et en tant qu'architecte, j'aimerais énoncer un principe sur lequel asseoir une restauration possible de l'édifice.

Je pense qu'il faudrait reconstruire une toiture discrète, soutenue par une charpente cachée utilisant tout simplement des techniques actuelles. On peut s'appuyer sur l'exemple de la cathédrale de Chartres dont la toiture avait brûlé en 1836 et que l'on avait alors dotée d'une superbe charpente métallique. En revanche, il me semble important de mettre l'accent sur la flèche...

Une flèche élancée, comme la précédente, mais en vitraux, se distinguerait comme un symbole fort du reste de la toiture ne cherchant pas à se différencier de ce qui existait précédemment. Pourquoi ne pas réutiliser fidèlement la forme de la flèche de Viollet-le-Duc en remplaçant simplement la couverture, l'habillage par des vitraux ?

Au coeur de la flèche serait placée une source lumineuse (leds ?) qui prendrait tout son sens, la nuit venue, en filtrant au travers des vitraux, faisant de la flèche un phare. En règle générale, la lumière donnant vie aux vitraux provient de l'extérieur des églises. Elle est apportée par le soleil. Dans le cas de notre flèche en vitraux, la lumière viendrait de l'intérieur, faisant rayonner cette partie de Notre-Dame dans la nuit.

La structure soutenant les vitraux devrait être étudiée pour la circonstance, la charpente appropriée. Il est d'ailleurs possible de faire en sorte d'apercevoir l'intérieur de la flèche, structure comprise et soleil aidant, comme un kaléidoscope, une rosace en trois dimensions (conique), en levant les yeux, dans la cathédrale, par l'aménagement d'un trou dans la voûte à cet endroit, en mémoire du sinistre. D'autre part, la lumière divine viendrait se projeter, créant un tapis coloré sur le sol et les objets liturgiques en passant au travers de la flèche.

Finalement il s'agirait de créer une flèche en vitraux visible de l'intérieur comme de l'extérieur, lumineuse de l'intérieur comme de l'extérieur.

Je ne suis personnellement pas d'accord pour une restauration de Notre-Dame de Paris à l'identique. Il faut témoigner de notre époque et de l'histoire de la cathédrale. Il faut restaurer avec les techniques actuelles, avec ce que nous savons faire aujourd'hui, en laissant l'empreinte de notre temps. Il faut préserver ce qui existe, garder ce qui est debout, et ajouter, créer là où ça n'existe plus.

Poursuivons l'histoire évolutive de la cathédrale de Paris par une « reconstruction inventive ». C'est d'ailleurs ce qu'avait fait Viollet-le-Duc en son temps en érigeant la flèche qui s'est effondrée le 15 avril dernier.

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